Journée régionale sur les paysages portuaires


Le 29 novembre dernier, s’est tenue au Havre, la 2ème édition des journées du paysage organisées chaque année par la DREAL Normandie. Inscrite dans le cadre de la mise en œuvre de la Convention européenne du paysage, cette journée, comme la précédente édition, s’est attachée à aborder un sujet peu classique pour des politiques du paysage  : les paysages portuaires. Le thème des ports prolonge ainsi en 2017, un cycle qui a débuté avec les paysages industriels en 2016.

Au-delà de l’image d’Epinal de la Normandie (les vaches sous les pommiers) véhiculée notamment sur les étiquettes des boîtes de camembert, la Normandie est une région très industrielle. C’est un élément que le Directeur régional de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement, Patrick BERG, a tenu à rappeler en introduction de cette journée. En Normandie, l’industrie concourt à créer des éléments de paysage forts, et empreints souvent d’une valeur patrimoniale certaine.

Comme Monet en 1872, c’est notamment en direction du port du Havre que les regards des participants ont été invités à se tourner ; Le Havre, cette ville-port construite par François Ier, dont on fête cette année les 500 ans.

C’est en particulier à travers le regard des artistes, qu’Annette HAUDIQUET, conservatrice en chef du Musée d’Art Moderne André Malraux (MuMa), a initié cette entrée en matière. S’appuyant sur une exposition en cours au MuMa (Comme une histoire, Le Havre… http://www.muma-lehavre.fr/fr/expositions/comme-une-histoire-le-havre) elle a décrit comment Turner, le premier, puis, Boudin, Pissaro, Raoul Dufy et Gaston Prunier, Monet bien sûr avec Impressions Soleil Levant, ont construit et porté à l’international l’image forte de la ville du Havre et de son port pendant un siècle, jusqu’en 1944.
Elle a montré comment 2 jours de bombardement, les 5 et 6 septembre 1944, ont anéanti, avec le centre du Havre, l’image de cette ville portée par les impressionnistes et les fauves, et seuls à en garder le souvenir.
Se référant à la théorie d’Alain Roger sur l’artialisation, elle a ensuite démontré comment Le Havre moderne est redevenu paysage grâce à la photographie, avec des artistes comme Henri Salesse, Lucien Hervé ou Gabriele Basilico et grâce aussi à la commande publique : celle du Ministère de la reconstruction et de l’Urbanisme (MRU), de la Direction générale du Tourisme, de la DATAR ou encore dernièrement du MuMa lui-même.

Si les paysages portuaires constituent un élément fort du patrimoine de la Normandie, l’activité portuaire sans cesse en évolution, génère aussi une adaptation permanente de la ville et la construction de nouveaux paysages. Au Havre, comme à Rouen ou à Caen, les relations ville-port sont amenées à se ré-inventer continuellement. Les interventions de Ludwig WILLAUME, élu caennais ; de Bertrand MASSON, directeur de l’aménagement et des grands projets de la Métropole de Rouen, et de Boris MENGUY, chef de projets à l’Agence d’Urbanisme de la Région du Havre et de l’Estuaire de la Seine, ont permis de rendre compte de ces nouveaux paysages en création sur les agglomérations caennaise, rouennaise et havraise  :

  • Comment le paysage peut-il se (re)construire lorsque le port s’éloigne de la ville ?
  • Comment réinvestir les espaces délaissés et quels sens leur donner par rapport à la ville et par rapport au port ?
  • Que conserver des traces visibles du passé portuaire (éléments structurants d’autrefois, repères visuels d’aujourd’hui) ?
  • Comment ré-écrire le présent ?
  • Comment raconter l’histoire ?
  • Quelle acceptation du changement ?

Autant de questions abordées à travers la présentation de la ZAC du Nouveau Bassin à Caen ou de l’écoquartier Flaubert à Rouen. Le paysage y est abordé en 4 dimensions, tant la dimension temporelle est apparue comme une composante essentielle du paysage.

Dans le prolongement d’Annette HAUDIQUET, les clefs de lecture du Havre ont ainsi été présentées par Boris MENGUY, en salle puis dans la ville elle-même. Après une présentation des différentes relations ville-port du Havre, des interpellations que le projet d’Antoine GRUMBACH a pu générer, et des réflexions en cours dans le cadre de « Ré-inventer la Seine », ce sont de nouvelles manières de fabriquer un territoire qui ont été présentées.

Enfin, une table ronde animée par Richard RAYMOND (CNRS) a permis de réunir des acteurs clefs du territoire havrais, en présence d’Eric FOULQUIER, maître de conférence à l’université de Brest dont les travaux portent en particulier sur la gouvernance des ports  :

  • Jean-Baptiste GASTINNE, 1er adjoint au Maire de la ville du Havre
  • Bruno DELSALLE, Directeur adjoint du Réseau Mondial des Villes Portuaires - AIVP
  • Jean-Denis SALESSE, responsable de la mission ville-port, au Grand Port Maritime du Havre
  • Stéphanie DEPOORTER, responsable du Service Territorial du Havre à la DDTM de Seine-Maritime et Karin HELMS, paysagiste-conseil de l’État au sein de la DDTM.

Deux axes ont animé cette discussion : les grands enjeux qui imposent de travailler l’articulation entre la ville et le port d’une part, et la gouvernance d’autre part. C’est à travers ces 2 axes qu’ont pu être abordés les différentes échelles d’appréhension des paysages portuaires, la question des risques et des nuisances, la question de l’attractivité de la ville et du port, du devenir des héritages ou encore des risques globaux et du changement climatique.

Comme l’a rappelé Patrick BERG, la journée paysage 2017 a ainsi été l’opportunité de démontrer que la politique du paysage nationale est une politique du présent, de l’avenir, et une politique bien vivante.
En 2018, le colloque annuel sur les paysages de la Normandie portera sur les paysages et les ouvrages d’art : ponts suspendus, viaducs ferroviaires, écluses de la Seine et cales des bacs de la Seine. La dimension mouvante du paysage avec ses différentes échelles, la relation entre les navires de haute mer, les bacs de Seine, et les paysages agricoles et urbains des boucles de la Seine, sera également abordée.

► Restitution :


Cliquez sur les images pour les agrandir (© DREAL Normandie / SECLAD)






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