Les différentes fonctions des haies

Construction humaine d’origine agricole, le bocage avait pour objectifs premiers de cloisonner l’espace pour contenir les animaux, de fournir le bois de chauffage et d’œuvre, d’offrir des ressources alimentaires complémentaires pour le bétail et les populations.


L’aspect paysager

La haie crée un maillage qui dynamise le paysage et lui donne toute sa signification. Le bocage est indissociable de la Normandie, il en est un marqueur fort.

Plus que le bocage, ce sont plusieurs types de bocages qui peuvent être observés en Normandie et donnent la typicité des différents paysages normands.


Les fonctions hydrologiques

Sous la haie et à proximité, le sol est meuble, riche en humus. En cas de pluie, son pouvoir absorbant est très important. Au voisinage des haies, les arbres et arbustes interceptent, avant leur arrivée au sol, une partie des précipitations dont ils modifient la distribution spatiale au sein de la parcelle. Ils prélèvent également de l’eau dans le sol.

Les haies modifient la circulation de l’eau en surface du sol, ralentissant le ruissellement et favorisent l’infiltration de l’eau. Elles limitent les risques et les effets des phénomènes de sécheresses et / ou de crues de faibles intensité. Elles ralentissent également l’érosion éolienne ou hydrique des sols.
Les haies contribuent à la qualité de l’eau. Le bocage concourt à limiter les transferts de particules érodées et d’éléments chimiques associés aux écoulements d’eau à la surface des sols (pesticides, phosphore…). Ainsi, les haies participent, par une action en amont, au maintien des écosystèmes aquatiques.

Le sol stocke l’eau qui va être progressivement prélevée par les racines des arbustes, puis évaporée par le feuillage (transpiration). Ceci favorise une humidité de l’air importante et une forte condensation durant la nuit, d’où le phénomène de rosée.


La fonction "brise vent"

Les haies, proportionnellement à leur largeur et leur hauteur et en fonction de leur composition, ont la particularité de freiner le vent jusqu’à plus de 40 % de sa vitesse, et ce sur une distance dix fois supérieure à la hauteur de la haie ! Cette action est très importante pour l’écosystème puisqu’elle réduit l’érosion éolienne et l’évaporation du sol.


La fixation des sols

Grâce à leurs racines, les haies consolident le sol et luttent efficacement contre les glissements de terrain. Ce rôle est particulièrement utile en bordure des cours d’eau où les racines maintiennent les berges.

En agissant sur le ruissellement, l’infiltration de l’eau, la puissance des crues… La haie permet de lutter contre l’érosion. En effet, elle freine le ruissellement de l’eau de pluie. Ainsi, elle stocke la terre en amont et limite l’érosion superficielle des sols en aval.

La présence de haies favorise aussi un étalement des crues et concourt à limiter leur force érosive. La haie augmente enfin les possibilités d’infiltration sur une large bande, au-delà de sa seule surface.
La structure du réseau de haies est très importante pour qu’elles jouent bien ce rôle. Il faut que la densité de haies soit suffisamment importante, qu’elles soient disposées selon les courbes de niveaux (perpendiculairement à la pente) et implantées idéalement sur un talus.


Le stockage de carbone

L’atténuation du changement climatique en cours est un défi crucial qui repose notamment, sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la séquestration de plus de carbone dans les sols.
Dans les zones agricoles, la plantation de haies est une pratique d’agroforesterie favorable à l’accroissement des stocks de carbone dans les sols et pour laquelle il y a encore peu de données notamment en milieu tempéré.

Néanmoins, dans le cadre des projets de recherche AgForward - Promotion des pratiques agroforestières pour favoriser le développement rural en Europe (EU 2014-2017) et Carbocage - Vers la neutralité Carbone des territoires (Ademe 2016-2019), des chercheurs de l’INRAE et leurs collègues ont arpenté les bocages de Bretagne et des Pays de Loire, évaluant les stocks de carbone organique des sols à proximité des haies bordant des parcelles agricoles. Ils se sont intéressés à des haies récentes, plantées il y a 20 ans, ou plus anciennes, héritées du paysage traditionnel et plantées il y a entre 40 et 120 ans.
Les mesures effectuées dans les différents sites montrent un effet significatif de la haie sur les stocks de carbone organique dans le sol des parcelles adjacentes, jusqu’à une distance de 3 mètres.

Le Giec et l’Ipbes, les experts intergouvernementaux du climat et de la biodiversité, appellent d’ailleurs, dans un rapport commun publié en juin 2021, à transformer le modèle agricole et à développer l’agroforesterie, comme l’une des solutions à ces deux crises environnementales majeures dont les effets vont sans doute s’accentuer.


Des habitats d’espèces

Les réseaux de haies forment une forêt linéaire intégrée à des espaces agricoles productifs, où la faune sauvage trouvent des abris et des refuges saisonniers, des lieux de nidification, des ressources alimentaires, des corridors biologiques. Certaines espèces de flore vont trouver au pied des haies les conditions idéales à leur installation et leur développement.

En Normandie, selon leur type et leur maturité, on trouvera dans les haies différentes espèces d’oiseaux en période de reproduction.

Les haies arbustives accueilleront les nids d’espèces comme le pinson des arbres, le merle noir, le rouge-gorge, la mésange charbonnière, l’accenteur mouchet, troglodyte mignon…

La présence d’arbres en sus de la strate arbustive, permettra à d’autres espèces d’établir leur nid : buse variable, bouvreuil pivoine, pigeon ramier, faucon crécerelle… Si ces arbres sont d’âge mûr, on peut trouver alors plusieurs espèces de pics. La présence de cavités permet l’installation de la huppe fasciée, la chevêche d’Athena, le grimpereau des jardins, la sitelle torchepot, plusieurs espèces de mésanges… C’est dans les haies présentant toutes les strates (arboré, arbustive et herbacée) que les espèces seront les plus nombreuses.

Ces mêmes types de haies jouent également un rôle déterminant pour les mammifères durant la période de reproduction. Elles accueillent le hérisson, l’écureuil, le muscardin, des chauve-souris pour lesquelles les haies sont également utilisées préférentiellement comme zones de chasse… et pour une myriade d’insectes…

En dehors de la période de reproduction, les haies, notamment lorsqu’un point d’eau est à moins de 250 mètres de celles-ci, sont occupées comme lieux d’hibernation par les amphibiens (crapauds, grenouilles, tritons…). Elles accueillent aussi des reptiles (lézard, couleuvre, orvet…), mammifères (hérisson, écureuil, chauve-souris…) et de nombreux insectes. Les qualités d’accueil sont optimisées lorsque la haie est établie sur talus car l’appareil racinaire des arbres et arbustes offre davantage de possibilités d’interstices souterrains utilisables par certaines de ces espèces.

C’est également en automne et en hiver que les oiseaux et les mammifères vont venir exploiter les ressources alimentaires des haies : fruits (prunelles, baies d’aubépine, fruit de lierre, mûres, merise, noisettes, glands, faines, châtaignes…), des proies animales (insectes, vers, larves, mollusques, micro-mammifères…) et végétales (feuilles, écorces, graminées…).
La haie est donc, tout au long de l’année, utilisée par nombre d’espèces animales, qu’elles soient protégées ou non, pour accomplir tout ou partie de leur cycle biologique.


Le déplacement des espèces

Le bocage est un élément majeur des continuités écologiques. Leur structure linéaire favorise le déplacement des populations et permet la circulation des espèces entre prairies, forêts, zones humides et autres habitats… Reliées les unes aux autres dans un maillage ininterrompu, elles forment un véritable corridor biologique.

Ces espaces semi-naturels appartiennent donc à la « trame verte » régionale : ils permettent aux espèces animales et végétales de se déplacer et d’interagir entre elles sur des surfaces suffisamment importantes et diversifiées. Par exemple, les lisières haies/cultures offrent des milieux variés aux espèces qui ont besoin de plusieurs écosystèmes pour se nourrir ou se reproduire.

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